Numéro 6

***

Le rapt


Le rapt

Hélène Ouedraogo (Saskatchewan)

Hélène Ouedraogo

Hélène Ouedraogo

Les quelques enjambées que je fis

La vie agonisante, je me rapprochai

L’arc-en-ciel de l’espoir, j’ai retrouvé

Mon âme à l’enfer se refusait.

 

De lait de chamelle, j’avais été gavée

Mon corps dans le sable prit forme

Mais le cache-cache demeurant favori

La transformation fut sauvage, la nature altérée.

 

Ce jour noir peint de soleil

Pourtant mère m’avait rassuré, donc encore cinq saisons

Sautant, chantant, gambadant dans le pâturage

De ma frêle allure, la capture n’avait égard.

 

J’étais enfant, je voulais le rester

Tapis sous le couvert maternel,

Reverdissant à toutes épopées

Contées sous les veilles de nouvelles lunes.

 

De ma frêle allure, la capture s’en moquait

Dans le dos, j’étais poignardée femme

Épouse, on m’y crucifia

Maudissant sans cesse le présent meurtrier.

 

Dans le dos, j’étais poignardée épouse

Femme, je devrais le devenir

Les soupirs et l’amertume avaient réveillé l’instinct

Femme, mon corps s’y refusait.

 

 Mes jambes à mon cou, je joignis

 La poudre d’escampette, je pris

 Scellé fut mon sort, fini innocence 

 Adieu enfance, adieu insouciance.

 

J’étais enfant, je voulais le rester

 De force, je fus précipitée 

L’enfer d’une vie adulte m’accueillait

D’une main, le bâillon se posa. 

 

Huit mains m’avaient transportée

Les ‘’bassimam’’(laissez-moi) que je vociférai

N’avaient ému personne, personne

Rudesse de vie, rapace, vorace, tenace.

 

Les coups de pied par-ci

Les coups de bras par-là

Des morsures de part et d’autre

Des petits coups, de petites morsures.

 

Dans une case j’étais jetée

Les cris stridents des mères

À mes oreilles parvenus, me transpercèrent 

Irriguant ma désolation, séchant mon innocence.

 

À mon absence le mariage fut scellé

Le père, fier, mâchait sa cola

Expliquant à ses pairs l’indicible exploit

L’école et les filles ne faisant bon ménage.

 

À mon absence le mariage fut scellé

Les noces trois lunes durèrent

Tantes et sœurs se saupoudraient

Mon cœur à la fête n’y tenait, je n’y étais.

 

Dans la nuit noire, j’y fus précipitée

Je me déchirai de partout

 Le soir, l’homme, le mari viendra

Son dû lui sera rendu, deux matrones seront là.

 

Elles appuieraient par-ci

Elles attraperaient par-là

Les genoux écartelés, on me tiendra

Lancinante sera la douleur.

 

Mais dans l’espérance de la mort

Le glas de mon enfance je le sonne

Les noces lugubres n’auront lieu

Ils entendront mon soupir, le dernier.

 

Les râles de mon corps mourant

Emporteront les déconfitures de la vie

L’âme en larmes retournera précoce

Dans le paradis du Bon Dieu.

 

Et moi, je les hanterai âprement

Je les poursuivrai de ma lance aiguisée

Le châtiment nullement ne s’éteindra 

En enfer, ils ne l’emporteront guère.

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