Errements
Hélène Ouedraogo (Saskatchewan)
Aurore, ma grand-mère - Nicole Dextras
Lettres en glace, 2008
J’appelle à la vie
J’appelle à l’espoir
Je me confie dans l’espérance.
Où est passée l’humanité pendant que mon peuple se meurt?
Où sont les elfes, les ancêtres, les fées et le grand chaman?
Le bison des plaines et l’éléphant d’Afrique ne sont-ils pas des cousins?
J’irai par les monts, j’irai par les plaines,
Au travers de la savane ensablée, je passerai
J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera
Mon peuple souffre et mon âme est en peine.
Oui, il est en peine de la souffrance de mon peuple
Oui, il est en peine de la souffrance de ton peuple
Je prendrai à témoin les mânes ancestraux
Je prendrai à témoin, le Grand Manitou
Je visiterai les traités et les accords
L’histoire est victime de violences.
J’irai par les monts, j’irai par les plaines,
Au travers de la savane ensablée, je passerai
J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera
Mon peuple souffre et mon âme est en berne.
Nous sommes frères, mon frère
Nous sommes sœurs, ma sœur.
Abreuvé d’une source une, enfants d’une même mère
L’âme est en peine.
L’autochtone et l’indigène ont le même soleil.
Pas celui des indépendances, car Wendé n’est pas obligé.
J’irai par les monts, j’irai par les plaines,
Au travers de la savane ensablée, je passerai
J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera
Mon peuple souffre et mon âme est en peine.
À petit feu le peuple refroidi voit son corps raidir.
Le Calumet s’est éteint, le chalumeau aussi
La forge a perdu ses rougeurs
L’enfant manque de pain, et la patrie d’eau.
La maladie ravage, le monde s’effondre
La terre est muette, plus de bise du matin.
J’irai par les monts, j’irai par les plaines,
Au travers de la savane ensablée, je passerai
J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera
Mon peuple souffre et mon âme est en berne.
Les aïeuls tourmentés, lancent des ouihhhhh.
Plus de paix dans l’au-delà, les étoiles se terrent dans le couvercle noir.
Sortez justiciers, réveille-toi crucifié
Hommes des tipis, hommes des cases, silence et force sont ta détresse
Ce silence gris déchiqueté par l’oppression,
Dégage l’odeur nauséabonde de la douleur
J’irai par les monts, j’irai par les plaines,
Au travers de la savane ensablée, je passerai
J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera
Mon peuple souffre et mon âme est en peine.
J’entends des cris se noyer dans les dunes
J’entends des cris flottant dans le silence bleu
J’entends la vie s’envoler dans les tréfonds des ondes pures
J’entends encore le silence des petites chaussures dans le grand blanc
Les soupirs migratoires de mon cœur sans cesse halètent
L’amélanche éclot bruissant d’amertume.
J’irai par les monts, j’irai par les plaines,
Au travers de la savane ensablée, je passerai
J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera
Mon peuple souffre et mon âme est en berne.
Personne ne fait le bien, pas même un seul
Il ne s’est trouvé ni héros, ni un Riel,
Il ne s’est trouvé ni Sankara, ni Yennega
Il ne s’est même pas trouvé
Une dent de Lumumba
Réveille-toi, mon frère, relève la tête.
J’irai par les monts, j’irai par les plaines,
Au travers de la savane ensablée, je passerai
J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera
Mon peuple souffre et mon âme est en peine.
Le dénouement vient et l’espérance aussi
Malheureux, douloureux, battus de la tempête et du verglas,
Ne promène pas des regards inquiets
La renaissance se trouve dans les plaines,
La renaissance se trouve dans le désert, le sable terre du désert
Demain est un autre jour.
J’irai par les monts, j’irai par les plaines,
Au travers de la savane ensablée, je passerai
J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera
Mon peuple souffre et mon âme est en berne.
Nous les retrouverons, nous les rassemblerons
Tous ces perdus de la forêt, du désert et de la méditerranée
Et la voix multicolore et gaie de tes enfants retentira dans la forêt au milieu de la forêt de pins et de sapins.
Les enfants de ma mère seront vomis du grand abime bleu
Les enfants de mon père resteront dans la case jaunie de fumée
Le battement du bendré vibrera dans nos cœurs
J’irai par les monts, j’irai par les plaines,
Au travers de la savane ensablée, je passerai
J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera
Mon peuple souffre et mon âme est en peine.
Les cris de tous ces serpents qui angoissent sifflent,
ton peuple est mon peuple, ton Dieu est mon Dieu.
La douleur est commune
Où achèterons-nous la paix?
L’ennemi fait rage, son glaive est aiguisé.
Pleure mon sort, pour toi je dirai des complaintes
J’irai par les monts, j’irai par les plaines,
Au travers de la savane ensablée, je passerai
J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera
Mon peuple souffre et mon âme est en berne.
Nous réunirons nos enfants, nous chanterons la paix, nous rachèterons un peu de liberté
Et ils y reposeront leurs âmes
Et leurs âmes aux tourments indicibles trouveront peut-être le repos.
Le lit inconnu des glaïeuls et les draps rougis par les coquelicots sont prêts.
Il est temps de danser la danse de l’amertume
Prenons des forces, je tiens notre plume.
Car boréale est l’aurore du crépuscule.
J’irai par les monts, j’irai par les plaines,
Au travers de la savane ensablée, je passerai
J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera
Mon peuple souffre et mon âme est en peine.
le crépuscule de la douleur un jour naitra
À chaque printemps nous fumerons le calumet
À l’ombre du grand baobab, nos sens de sauge apaisée
Demain naitra dans nos cœurs le soleil de l’espoir et de la gloire
Lorsqu’à l’aube le cocorico du coq tu entendras,
Souviens-toi de mon merci;
Je déposerai mon bark zamen devant ta porte.
C’est pourquoi dès l’aube
J’irai par les monts, j’irai par les plaines,
Au travers de la savane ensablée, je passerai
J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera
Mon peuple souffre et mon âme est en peine.
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