Protéger la communauté LGBTQ+ : décryptage des recours juridiques contre l'intimidation
Le 10 avril, le projet En toute fierté de l’Assemblée communautaire fransaskoise (ACF) et l’Association des juristes d’expression française de la Saskatchewan (AJEFS) ont organisé un atelier juridique en ligne sur l’intimidation, la cyberintimidation et les sextos, avec une attention particulière sur la protection de la communauté LGBTQIA2S+.
Menaces, chantage, harcèlement en ligne ou partage non consenti de photos intimes… Si l’intimidation peut toucher l’ensemble de la société, elle frappe plus durement les minorités.
Selon des données de Statistique Canada datant de 2022, 77 % des jeunes LGBTQ+ subissent de l’intimidation, contre 69 % de leurs pairs cisgenres hétérosexuels.
Si des recours juridiques existent, ils restent encore méconnus. La formation a donc clarifié les bases, sanctions et procédures de plainte, combinant expertise juridique et autonomisation.
L’intimidation en 2025
L’intimidation n’est pas un concept nouveau, mais ses formes multiples complexifient sa perception et sa lutte.
Loin de se limiter aux simples moqueries ou aux insultes, elle englobe aussi les violences physiques, le taxage, l’exclusion sociale ou la propagation de rumeurs.
Quand l'intimidation cible la communauté LGBTQ+, elle prend racine dans l'homophobie, un phénomène nourri par des préjugés persistants, mais aussi des expressions quotidiennes.
En apparence anodins, des termes comme « C’est tellement gay » contribuent à normaliser un climat négatif et hostile.
Le monde numérique a amplifié les risques : anonymat propice aux discours haineux, diffusion virale de données personnelles et usurpation d’identité exacerbent la cyberintimidation et la cyberhomophobie.
L’AJEFS souligne ainsi que « la communauté LGBTQIA2S+ est deux fois plus à risque d’être victime de cyberintimidation ».
Les sextos (messages ou photos intimes) représentent un autre piège. En cas de chantage ou de partage non consenti, les conséquences peuvent être dramatiques.
Que dit la loi ?
Le Canada dispose de législations fortes contre les discriminations. Depuis 2022, les thérapies de conversion visant à modifier, réduire ou réprimer l'orientation sexuelle, l’expression ou l'identité de genre constituent un crime passible d’amendes et de 5 ans d'emprisonnement.
Au niveau fédéral, la communauté LGBTQ+ est protégée par l’article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés, qui interdit la discrimination fondée sur [..] l’orientation sexuelle, l’identité ou l’expression de genre, mais aussi par l’article 13 de la Loi canadienne sur les droits de la personne qui rend illégaux les actes discriminatoires.
En Saskatchewan, le Code des droits de la personne protège contre les discriminations dans divers domaines (emploi, logement, services publics, etc.) tandis que le Code criminel sanctionne le harcèlement, les menaces ou l'usurpation d'identité, avec des peines allant jusqu'à l'emprisonnement.
Pourtant, malgré ces outils, les crimes haineux liés à l’orientation sexuelle ont quadruplé entre 2018 et 2022, toujours d’après Statistique Canada.
Comme l’explique Alain Michel Rugezo, agent de développement à l’AJEFS, « les victimes hésitent souvent à porter plainte par crainte des représailles. Cette décision peut avoir un impact sur leur bien-être physique et mental. »
Qu’elles choisissent ou non d’engager des poursuites, les victimes sont ainsi encouragées à parler à une personne de confiance, à prendre des notes détaillées (date, heure, faits) et à éviter toute riposte pour ne pas envenimer la situation.
La victime aura ensuite le choix de porter plainte dans l’année qui suit les faits auprès de la Commission des droits de la personne de la Saskatchewan.
Si l'arsenal juridique canadien offre des recours, son efficacité dépend d'un double défi : connaître ses droits et oser les faire valoir.