C’est décidé, j’arrête le sucre
Je profite des derniers beaux jours lors d’un pique-nique entre amis quand, allongée sur l’herbe la main dans le paquet de chips, j’entends : « Tu manges encore du sucre ? » Je réponds la bouche pleine, « ce n’est pas du sucre, c’est du gras et du sel ». Mais cette rabat-joie m’explique que le sucre se cache partout, que je suis dépendante sans le savoir, que c’est encore plus puissant que la cocaïne.
« Tu t’endors après les repas ? Tu as des ballonnements, des douleurs articulaires, des boutons, des fringales ? Un seul coupable ! Le glucose et ses associés. »
Maman de trois enfants, fin de quarantaine, je pensais que c’était normal d’être un peu fatiguée et d’avoir les hormones qui travaillent. Mais soit. Addiction réaction !
Moi qui me pique d’avoir arrêté de fumer très facilement sans aucun effet de manque depuis 7 963 jours et demi, je peux prouver que je ne suis pas une droguée. C’est décidé, j’arrête le sucre. Il suffira de mettre de la stévia dans mon yaourt, pensé-je.
Mais c’était de la poudre aux yeux ! Cet oiseau de malheur avait raison, dès que l’on se penche sur les étiquettes, on constate que le sucre est partout.
Peu cher, à fort pouvoir gustatif, il est l’allié des industriels. Il va falloir que j’abandonne les plats préparés et que je me remette en cuisine. Finalement, l’héroïne, c’est moi !
Dès le deuxième jour de ce nouveau régime, j’ai les mains qui tremblent et je ne pense qu’à m’enfiler une tablette de chocolat.
Pour me changer les idées, je sors faire un tour du quartier, mes écouteurs dans les oreilles. Baila sexy thing passe à la radio. Normalement, ce n’est pas ma came mais je m’identifie au titre. Je me dandine dessus quand l’animateur cite le chanteur, Zucchero ! Sans être totalement bilingue, j’ai une bonne idée de la traduction. Décidément, le sucre est dans tous les plaisirs.
J’éteins la musique et marche d’un pas décidé vers la boîte à livres la plus proche. (Toujours chercher réconfort dans la littérature).
Un petit bouquin de Roald Dahl m’interpelle, mais je le relâche aussitôt : La merveilleuse histoire de Henry Sugar a failli me filer une attaque. J’en ai des sueurs froides. Sans doute un pic de cortisol.
Je me mets à courir pour évacuer le stress et faire descendre ma glycémie quand arrive un chien à l’humeur joueuse. Je shoot dans sa balle, sa maîtresse le rappelle : « Sugar, au pied ! »
Je sais bien qu’on ne me croira pas, qu’on pensera à des hallucinations, mais tout est véridique. Cette balade tournait au bad trip, avec Sugar qui me collait aux basques.
La fausse nutritionniste disait vrai. Le sucre est partout dans ma vie. Il me chante à l’oreille, il fait le beau et me donne la patte. Mais je poursuis mon sevrage. Et si un jour j’ai un nouveau chat, je l’appellerai Aspartame.