Horizons

Chronique littéraire publiée dans l'Eau vive

Art hur Béague

Blob l’indestructible

Ni animal ni végétal ni champignon, mais bien vivant ! Dépourvu de cerveau, mais bien intelligent ! Unicellulaire, mais bien géant ! Rencontre avec le blob, cette créature qui sort de 500 millions d’années de mutisme.

Nombre de marcheurs sont sûrement passés devant lui, qui est présent dans tous les sous-bois du globe, sans connaître son incroyable pouvoir, le confondant avec un vulgaire lichen. Non, le myxomycète ne fait pas partie de ce monde : il est tout droit sorti d’un Marvel !

Audrey Dussutour, chercheuse au CNRS, a la chance de côtoyer quotidiennement ce superhéros. Un soir de 1998, elle accepte de prêter main-forte à un nutritionniste en faisant la baby-sitter de ce « champignon gluant ». Le nourrir de flocons d’avoine, le protéger de la lumière… Autant de travail que pour un labrador et il ne ramène même pas la balle !

Quelle ne fut pas sa surprise en ouvrant la boîte le lendemain de voir que la masse jaune gluante avait doublé de volume ! Audrey Dussutour et d’autres chercheurs se sont penchés sur son cas et ils ne se doutaient sûrement pas des formidables découvertes scientifiques qu’ils feraient, jetant bon nombre d’affirmations biologiques à la poubelle.

Une créature fascinante

Le blob est un être unicellulaire, de quoi nouer un sérieux complexe d’infériorité face aux champignons, végétaux et animaux qui, bien souvent, n’ont que faire des milliers, voire des milliards de cellules dont ils sont dotés ! Des quantités qui forment des organes locomoteurs, digestifs, reproducteurs … Bref, le luxe !

Blob n’a rien à envier à ces êtres vivants parce qu’il est les trois à la fois. Il se déplace et se nourrit comme un animal, produit des pigments comme une plante et se reproduit comme un champignon. Un organisme vivant inclassable tant et si bien que les biologistes le rangent dans les « protistes », taxon fourre-tout des eucaryotes unicellulaires.

Impossible de détailler toutes les caractéristiques de cet organisme incroyable capable de mesurer jusqu’à 1 km² (avec une seule cellule !) et de se déplacer jusqu’à 4 km/h pour se goinfrer des champignons dont il raffole.

Des capacités étonnantes

Comme chez les champignons, le blob mature va libérer des spores. Normalement, et c’est partout pareil, il faut que le sexe mâle rencontre le sexe femelle pour que progéniture il y ait. Pas chez Blob. Ce dernier possède pas moins de 221 sexes différents !

Mais ce qui intéresse encore plus les scientifiques, c’est que Blob semble être capable de faire preuve d’intelligence sans cerveau, encore connu en 2019 pour être le siège de la mémoire et de l’apprentissage. Toshiyuki Nakagaki et ses collaborateurs ont montré que le physarum polycephalum, espèce la plus étudiée chez les blobs, était capable de résoudre un labyrinthe. Encore plus fou, elle serait également capable d’habituation, première forme d’apprentissage.

En écrivant ces quelques lignes, je me rends compte du caractère totalement ubuesque de ces allégations et je n’ose à peine vous dire que Blob sait également transmettre son savoir et possèderait des « personnalités » différentes selon sa provenance. Tellement à dire et encore tant à découvrir sur cette créature qui semble se moquer de tous les principes fondamentaux de la biologie moderne.

Si vous sentez le vent tourner et un possible contrôle de l’univers par les blobs, gardez à l’esprit qu’ils ont leur point faible : la lumière et le manque de nourriture auront raison d’eux. Enfin presque… En laboratoire, même après des années de dormance, un blob n’est jamais réellement mort !

Se lier d’amitié avec Blob est peut-être la solution. D’ailleurs, des laboratoires proposent des kits avec un blob, de l’avoine et un labyrinthe. Quitte à passer la nouvelle année entre eucaryotes, autant le faire avec des êtres fantastiques !

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