Numéro 1 - Printemps 2017

***

Errements


Errements

Hélène Ouedraogo (Saskatchewan)

Aurore, ma grand-mère - Nicole Dextras

Aurore, ma grand-mère - Nicole Dextras

Lettres en glace, 2008

J’appelle à la vie

J’appelle à l’espoir

Je me confie dans l’espérance.

Où est passée l’humanité pendant que mon peuple se meurt?

Où sont les elfes, les ancêtres, les fées et le grand chaman?

Le bison des plaines et l’éléphant d’Afrique ne sont-ils pas des cousins?

 

J’irai par les monts, j’irai par les plaines,

Au travers de la savane ensablée, je passerai

J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera

Mon peuple souffre et mon âme est en peine.

 

Oui, il est en peine de la souffrance de mon peuple

Oui, il est en peine de la souffrance de ton peuple

Je prendrai à témoin les mânes ancestraux

Je prendrai à témoin, le Grand Manitou

Je visiterai les traités et les accords

L’histoire est victime de violences.

 

J’irai par les monts, j’irai par les plaines,

Au travers de la savane ensablée, je passerai

J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera

Mon peuple souffre et mon âme est en berne.

 

Nous sommes frères, mon frère

Nous sommes sœurs, ma sœur.

Abreuvé d’une source une, enfants d’une même mère

 L’âme est en peine.

L’autochtone et l’indigène ont le même soleil.

Pas celui des indépendances, car Wendé n’est pas obligé.

 

J’irai par les monts, j’irai par les plaines,

Au travers de la savane ensablée, je passerai

J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera

Mon peuple souffre et mon âme est en peine.

 

À petit feu le peuple refroidi voit son corps raidir.

Le Calumet s’est éteint, le chalumeau aussi

La forge a perdu ses rougeurs

L’enfant manque de pain, et la patrie d’eau.

La maladie ravage, le monde s’effondre

La terre est muette, plus de bise du matin.

 

J’irai par les monts, j’irai par les plaines,

Au travers de la savane ensablée, je passerai

J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera

Mon peuple souffre et mon âme est en berne.

 

Les aïeuls tourmentés, lancent des ouihhhhh.

Plus de paix dans l’au-delà, les étoiles se terrent dans le couvercle noir.

Sortez justiciers, réveille-toi crucifié

Hommes des tipis, hommes des cases, silence et force sont ta détresse

Ce silence gris déchiqueté par l’oppression,

Dégage l’odeur nauséabonde de la douleur

 

J’irai par les monts, j’irai par les plaines,

Au travers de la savane ensablée, je passerai

J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera

Mon peuple souffre et mon âme est en peine.

 

J’entends des cris se noyer dans les dunes

J’entends des cris flottant dans le silence bleu

J’entends la vie s’envoler dans les tréfonds des ondes pures

J’entends encore le silence des petites chaussures dans le grand blanc

Les soupirs migratoires de mon cœur sans cesse halètent

L’amélanche éclot bruissant d’amertume.

 

 

 

 

 

J’irai par les monts, j’irai par les plaines,

Au travers de la savane ensablée, je passerai

J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera

Mon peuple souffre et mon âme est en berne.

 

Personne ne fait le bien, pas même un seul

Il ne s’est trouvé ni héros, ni un Riel,

Il ne s’est trouvé ni Sankara, ni Yennega

Il ne s’est même pas trouvé

Une dent de Lumumba

Réveille-toi, mon frère, relève la tête.

 

J’irai par les monts, j’irai par les plaines,

Au travers de la savane ensablée, je passerai

J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera

Mon peuple souffre et mon âme est en peine.

 

Le dénouement vient et l’espérance aussi

Malheureux, douloureux, battus de la tempête et du verglas,

 Ne promène pas des regards inquiets

La renaissance se trouve dans les plaines,

La renaissance se trouve dans le désert, le sable terre du désert

Demain est un autre jour.

 

J’irai par les monts, j’irai par les plaines,

Au travers de la savane ensablée, je passerai

J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera

Mon peuple souffre et mon âme est en berne.

 

 

Nous les retrouverons, nous les rassemblerons

Tous ces perdus de la forêt, du désert et de la méditerranée

Et la voix multicolore et gaie de tes enfants retentira dans la forêt au milieu de la forêt de pins et de sapins.

Les enfants de ma mère seront vomis du grand abime bleu

Les enfants de mon père resteront dans la case jaunie de fumée

Le battement du bendré vibrera dans nos cœurs

 

J’irai par les monts, j’irai par les plaines,

Au travers de la savane ensablée, je passerai

J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera

Mon peuple souffre et mon âme est en peine.

 

Les cris de tous ces serpents qui angoissent sifflent,

ton peuple est mon peuple, ton Dieu est mon Dieu.

La douleur est commune

Où achèterons-nous la paix?

L’ennemi fait rage, son glaive est aiguisé.

Pleure mon sort, pour toi je dirai des complaintes

 

J’irai par les monts, j’irai par les plaines,

Au travers de la savane ensablée, je passerai

J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera

Mon peuple souffre et mon âme est en berne.

Nous réunirons nos enfants, nous chanterons la paix, nous rachèterons un peu de liberté

Et ils y reposeront leurs âmes

Et leurs âmes aux tourments indicibles trouveront peut-être le repos.

Le lit inconnu des glaïeuls et les draps rougis par les coquelicots sont prêts.

Il est temps de danser la danse de l’amertume

Prenons des forces, je tiens notre plume.

Car boréale est l’aurore du crépuscule.

 

J’irai par les monts, j’irai par les plaines,

Au travers de la savane ensablée, je passerai

J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera

Mon peuple souffre et mon âme est en peine.

 

le crépuscule de la douleur un jour naitra

À chaque printemps nous fumerons le calumet

À l’ombre du grand baobab, nos sens de sauge apaisée

Demain naitra dans nos cœurs le soleil de l’espoir et de la gloire

Lorsqu’à l’aube le cocorico du coq tu entendras,

Souviens-toi de mon merci;

Je déposerai mon bark zamen devant ta porte.

 

C’est pourquoi dès l’aube

J’irai par les monts, j’irai par les plaines,

Au travers de la savane ensablée, je passerai

J’atteindrai Qu’Appelle Valley, et ma voix éteinte soufflera

Mon peuple souffre et mon âme est en peine.

Article précédent Les découpeuses
Prochain article L’Éveil d’Abélard
Imprimer
3
Lancement de Le musée des objets perdus
RAFA-ACO-10-2023
Séduction à Vancouver
Cabaret littéraire 6 octobre 2024

Printemps 2017

Un jour de grand vent (extrait) Un jour de grand vent (extrait)

Mardi le 10 mai ’66. De bonne heure le matin, au Restaurant Lafontaine à Métabetchouan au Lac-Saint-Jean. L’accent du Lac est présent à différents degrés chez les personnages. Il affecte en particulier Monsieur Pit, un sympathique septuagénaire à la retraite. Jeannot Lafontaine, douze ans, est debout derrière le comptoir. Il porte son uniforme d’écolier  sous un tablier. Monsieur Pit est assis à son...

La Voie lactée La Voie lactée

Il était une fois,
au fin fond du Far West canadien,
dans une province au nom imprononçable,
une cavalière redoutable.

Le grand barrage

À défaut d'être aimé, Henri était respecté de tous les castors. Sa supériorité ne laissait aucun doute. On n'avait qu'à regarder son barrage pour comprendre qu'il était plus doué que les autres.

Knockout

L’aiguille de glace qui arracha Victor Florkowski à la vie ressemblait à un ivoire de mammouth. Elle était aussi large qu’un pneu, aussi longue que la victime, et se rétrécissait en une pointe cristalline —  à double tranchant — dont la beauté fatale resplendissait sous clair de lune.

Cantate pour légumes (Extrait)

Au cœur de ce texte sont quatre êtres qui ont perdu leur voix, la capacité d’exprimer leur volonté et leur angoisse. Ancrés dans leurs fauteuils roulants, Asperge, Gourde, Navet et Asperge rêvent d’évasion. Dans les solos de la cantate, les légumes expriment leurs désires les plus profonds.

Triptyque - Micro nouvelles Triptyque - Micro nouvelles

Au coin de l’avenue Idylwyld et la 23e un bip discontinu se fait entendre à ma gauche. Un clignotement sonore: on peut traverser.  Entre les deux lignes on peut traverser. “Passez, monsieur. Priorité aux piétons.” Oui, on peut traverser. On peut traverser si les autos s’arrêtent.

Entreciel

Sorties de l’entretoit des corniches des greniers de mille espaces connus d’elles seules oubliés par concierges et architectes, les hirondelles occupent dès le matin l’entreciel, la part élevée de Madrid, en rase-tête des habitants des terrasses jusqu’à la proximité des saints perchoirs, des croix des antennes, faisant fi de nos communications avec l’au-delà.

La mousse La mousse

Maman, pourquoi c’est mouillé ici? 

C’est la mousse, mon chéri. Fais attention à ne pas glisser.

De la supercherie De la supercherie

Cette réflexion est née d’un constat. La vie ne nous appartient pas. Elle nous a été léguée et nous la rendrons en même temps que notre dernier souffle.

No content

A problem occurred while loading content.

Previous Next

Merci à nos partenaires et commanditaires:

Coopérative des publications fransaskoises    Conseil culturel fransaskois   Saskculture Fondation fransaskoise