Numéro 1 - Printemps 2017

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Entreciel


Entreciel

Jérome Melançon

Sorties de l’entretoit des corniches des greniers de mille espaces connus d’elles seules oubliés par concierges et architectes, les hirondelles occupent dès le matin l’entreciel, la part élevée de Madrid, en rase-tête des habitants des terrasses jusqu’à la proximité des saints perchoirs, des croix des antennes, faisant fi de nos communications avec l’au-delà.

De leur entreciel les hirondelles narguent les chats les attirent sur les tuiles glissantes des toits leur font oublier la précarité des murs des terrasses les mètres les séparant de la terre ferme l’immensité qui les en séparent même en comptant les bonds les plus agiles l’absence de griffes ou d’entraînement aux griffes – et la différence entre la prise d’une plume égarée et celle de l’oiseau entier. Il suffirait pourtant d’être patient : les chats connaissent aussi les coins chauds et discrets des toits. Murillo va nous faire un dessin. La nuit venue, le choix est clair : la sûreté des croquettes et la chaleur du lit se posent comme une solide alternative à la chasse aux tourments.

De leur entreciel les hirondelles craignent les chats malgré la haute voltige la chasse mutuelle l’art pour l’art les volte-face les vols planés qui tous entraînent le danger de l’oubli de soi (le vol tout entier quête de l’oubli de soi quête de l’unité avec la nature avec la ville avec les autres hirondelles) sans compter la proximité des toits des fenêtres trop bien lavées – et des chats toujours aux aguets griffes affilées ventres bien remplis ne chassant que pour la chasse et les bonds planés. La beauté de l’ami en vol magnifiée par le danger de ces proximités, souvent entachée d’une mort soudaine.

L’exploration des recoins des ruines des chantiers des lieux communs la bravoure de le faire en piqué ajoute à la beauté à la bonté à la justesse à l’abnégation – haute voltige! L’hirondelle – celle-là même qui se laisse suivre du regard des minutes durant jusqu’à se fondre dans la luminosité céleste, celle-là même dont le cri surgit de toutes et partout à la fois, celle-là même qui prend pour compagnes de vol celles qui semblent aller dans une même direction et pour compagnon le temps de leur convergence, celle-là même qui ne s’embête pas de liberté ne connaissant pas l’oppression – l’hirondelle personnage tragique de l’entreciel madrilène doit parfois se poser.

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Printemps 2017

Un jour de grand vent (extrait) Un jour de grand vent (extrait)

Mardi le 10 mai ’66. De bonne heure le matin, au Restaurant Lafontaine à Métabetchouan au Lac-Saint-Jean. L’accent du Lac est présent à différents degrés chez les personnages. Il affecte en particulier Monsieur Pit, un sympathique septuagénaire à la retraite. Jeannot Lafontaine, douze ans, est debout derrière le comptoir. Il porte son uniforme d’écolier  sous un tablier. Monsieur Pit est assis à son...

La Voie lactée La Voie lactée

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Knockout

L’aiguille de glace qui arracha Victor Florkowski à la vie ressemblait à un ivoire de mammouth. Elle était aussi large qu’un pneu, aussi longue que la victime, et se rétrécissait en une pointe cristalline —  à double tranchant — dont la beauté fatale resplendissait sous clair de lune.

Cantate pour légumes (Extrait)

Au cœur de ce texte sont quatre êtres qui ont perdu leur voix, la capacité d’exprimer leur volonté et leur angoisse. Ancrés dans leurs fauteuils roulants, Asperge, Gourde, Navet et Asperge rêvent d’évasion. Dans les solos de la cantate, les légumes expriment leurs désires les plus profonds.

Triptyque - Micro nouvelles Triptyque - Micro nouvelles

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Entreciel

Sorties de l’entretoit des corniches des greniers de mille espaces connus d’elles seules oubliés par concierges et architectes, les hirondelles occupent dès le matin l’entreciel, la part élevée de Madrid, en rase-tête des habitants des terrasses jusqu’à la proximité des saints perchoirs, des croix des antennes, faisant fi de nos communications avec l’au-delà.

La mousse La mousse

Maman, pourquoi c’est mouillé ici? 

C’est la mousse, mon chéri. Fais attention à ne pas glisser.

De la supercherie De la supercherie

Cette réflexion est née d’un constat. La vie ne nous appartient pas. Elle nous a été léguée et nous la rendrons en même temps que notre dernier souffle.

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