Fable à la chinoise Ian C. Nelson Illustration : Sharon Pulvermacher Etcétéra s’arrêta pile, ne pouvant point avancer d’un pas, même en s’écrivant en toutes lettres. Arrivé à la fin d’une phrase etcétéra se trouvait planté devant l’abîme. Et voilà, personne n’ose lui attacher les trois points de suspension quand il se présente en abréviation, même s’il veut bien évoquer tout un monde supplémentaire à l’énoncé. Son jumeau Et Alia – et al. pour ses intimes – lui rit en pleine figure, car dans les deux occurrences, celui-ci étale aisément toute une foule d’écrivains et de philosophes pour continuer un débat. Maintenant, grâce à cette supériorité, Et Alia prend impunément un plaisir malicieux en lançant à son frangin son insulte : va te faire voir chez les Grecs, etc. Ian C. Nelson Décédé le 1er février 2024, Ian C. Nelson était metteur en scène et acteur bilingue (plus de 115 mises en scène et 130 rôles) et était membre du comité qui a mis sur pied la revue À ciel ouvert.. Il a animé le Cercle des écrivains de la Troupe du jour pendant plusieurs années. Sa propre pièce La Chambre blanche a reçu le prix SATA (Saskatoon Area Theatre Award) 2013-2014 pour la dramaturgie. Récipiendaire d’un « Lifetime Achievement Award » en 1996, il a été intronisé en 2014 au Temple de la renommée du Théâtre Saskatchewan en reconnaissance de ses activités dans le développement du théâtre en français et en anglais en Saskatchewan. Des exemples de ses micronouvelles (devenu son genre préféré) ont été publiés dans À ciel ouvert, la chronique « Horizons » de l’Eau vive, et dans Bref! (Éditions du blé, Saint-Boniface). Prochain article Sous la lune Imprimer 5607 Balises: Ian C. Nelson Articles connexes Hommage à Ian C. Nelson Micronouvelles Le grand « capitaine Nelson » du théâtre fransaskois Le cheveu sur la soupe L’oreiller
Un jour de grand vent (extrait) Mardi le 10 mai ’66. De bonne heure le matin, au Restaurant Lafontaine à Métabetchouan au Lac-Saint-Jean. L’accent du Lac est présent à différents degrés chez les personnages. Il affecte en particulier Monsieur Pit, un sympathique septuagénaire à la retraite. Jeannot Lafontaine, douze ans, est debout derrière le comptoir. Il porte son uniforme d’écolier sous un tablier. Monsieur Pit est assis à son...
La Voie lactée Il était une fois, au fin fond du Far West canadien, dans une province au nom imprononçable, une cavalière redoutable.
Le grand barrage À défaut d'être aimé, Henri était respecté de tous les castors. Sa supériorité ne laissait aucun doute. On n'avait qu'à regarder son barrage pour comprendre qu'il était plus doué que les autres.
Knockout L’aiguille de glace qui arracha Victor Florkowski à la vie ressemblait à un ivoire de mammouth. Elle était aussi large qu’un pneu, aussi longue que la victime, et se rétrécissait en une pointe cristalline — à double tranchant — dont la beauté fatale resplendissait sous clair de lune.
Cantate pour légumes (Extrait) Au cœur de ce texte sont quatre êtres qui ont perdu leur voix, la capacité d’exprimer leur volonté et leur angoisse. Ancrés dans leurs fauteuils roulants, Asperge, Gourde, Navet et Asperge rêvent d’évasion. Dans les solos de la cantate, les légumes expriment leurs désires les plus profonds.
Triptyque - Micro nouvelles Au coin de l’avenue Idylwyld et la 23e un bip discontinu se fait entendre à ma gauche. Un clignotement sonore: on peut traverser. Entre les deux lignes on peut traverser. “Passez, monsieur. Priorité aux piétons.” Oui, on peut traverser. On peut traverser si les autos s’arrêtent.
Entreciel Sorties de l’entretoit des corniches des greniers de mille espaces connus d’elles seules oubliés par concierges et architectes, les hirondelles occupent dès le matin l’entreciel, la part élevée de Madrid, en rase-tête des habitants des terrasses jusqu’à la proximité des saints perchoirs, des croix des antennes, faisant fi de nos communications avec l’au-delà.
La mousse Maman, pourquoi c’est mouillé ici? C’est la mousse, mon chéri. Fais attention à ne pas glisser.
De la supercherie Cette réflexion est née d’un constat. La vie ne nous appartient pas. Elle nous a été léguée et nous la rendrons en même temps que notre dernier souffle.