Numéro 1 - Printemps 2017

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Pow-wowland du vingtième siècle

Pow-wowland du vingtième siècle

Pow-wowland du vingtième siècle

En 1920, célébration du centenaire, cadence du temps,
commémorant le moment
quand tout a changé.
Une rupture, renommer le territoire, violemment apprivoisé.
Découpé et revendiqué, colonisé, l’état du Maine.

Deux visages aux regards fixes, des enfants, couleur sépia,
qualité muséale, collés aux pages.
Fille et garçon froncent le sourcil devant l’œil de la caméra,
lentille rigide de l’histoire, une arme dangereuse.

Trente ans depuis la dernière grande danse dans les Dakota,
quand les balles voyageaient plus rapidement
que la lumière qui a figé ces deux êtres.
Rassemblant les fantômes, les suppliants ont enterré leurs cœurs,
sont morts sur la terre gelée.

La lumière captive éblouit ces jeunes yeux,
révèle leurs sourires à moitié grimaces.
Disparus, le wigwam en écorce de bouleau,
le tipi en peau de buffle.
Avec comme arrière-plan une tente en jute, les fossettes
du garçon sont badigeonnées de peinture de « guerre »,
il se tient droit à côté de sa sœur, cousine.
Les tresses de la fillette sont parées de plumes de pacotille.

Les enfants prennent la pose maintenant,
une cérémonie à grand spectacle remplace la guerre.
Le loup est une légende qui porte
la robe d’un chien tenu en laisse,
et les yeux impassibles des guerriers sont maintenant clos,
sa poigne inébranlable vide, son cri de bataille
à présent silencieux dans ce cliché terni,
ce pow-wowland du vingtième siècle.


Texte : Mihku Paul
Illustration : Emily Sanipass
Traduction : Sophie M. Lavoie


Mihku Paul

Mihku Paul

Mihku Paul (1958-) est une poète wolastoq (malécite) qui vit au Maine. Sa famille est originaire de Kingsclear au Nouveau-Brunswick et elle est membre de cette réserve depuis les amendements de 1985 à la Loi sur les indiens. Le poème original en anglais a été publié dans le recueil éponyme (20th Century PowWow Playland, New York: Bowman Books, 2012. Native New England Authors Series 9).

Sophie M. Lavoie

Sophie M. Lavoie

Originaire de la Nouvelle Écosse, Sophie M. Lavoie est une traductrice littéraire et professeure à l'Université du Nouveau Brunswick à Fredericton. Ses dernières traductions littéraires publiées en français sont: Nous sommes les rêveurs de la poète mi'kmaq Rita Joe (Mémoire d'Encrier, 2016) et Chutes Réversibles: Poèmes en langue anglaise du Nouveau Brunswick, traduits en français (en deux volumes, Frog Hollow Books, 2020)

Wounded Generation

Wounded Generation

Emily Sanipass,
Dessin - 2020

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Printemps 2017

Un jour de grand vent (extrait) Un jour de grand vent (extrait)

Mardi le 10 mai ’66. De bonne heure le matin, au Restaurant Lafontaine à Métabetchouan au Lac-Saint-Jean. L’accent du Lac est présent à différents degrés chez les personnages. Il affecte en particulier Monsieur Pit, un sympathique septuagénaire à la retraite. Jeannot Lafontaine, douze ans, est debout derrière le comptoir. Il porte son uniforme d’écolier  sous un tablier. Monsieur Pit est assis à son...

La Voie lactée La Voie lactée

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À défaut d'être aimé, Henri était respecté de tous les castors. Sa supériorité ne laissait aucun doute. On n'avait qu'à regarder son barrage pour comprendre qu'il était plus doué que les autres.

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L’aiguille de glace qui arracha Victor Florkowski à la vie ressemblait à un ivoire de mammouth. Elle était aussi large qu’un pneu, aussi longue que la victime, et se rétrécissait en une pointe cristalline —  à double tranchant — dont la beauté fatale resplendissait sous clair de lune.

Cantate pour légumes (Extrait)

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Triptyque - Micro nouvelles Triptyque - Micro nouvelles

Au coin de l’avenue Idylwyld et la 23e un bip discontinu se fait entendre à ma gauche. Un clignotement sonore: on peut traverser.  Entre les deux lignes on peut traverser. “Passez, monsieur. Priorité aux piétons.” Oui, on peut traverser. On peut traverser si les autos s’arrêtent.

Entreciel

Sorties de l’entretoit des corniches des greniers de mille espaces connus d’elles seules oubliés par concierges et architectes, les hirondelles occupent dès le matin l’entreciel, la part élevée de Madrid, en rase-tête des habitants des terrasses jusqu’à la proximité des saints perchoirs, des croix des antennes, faisant fi de nos communications avec l’au-delà.

La mousse La mousse

Maman, pourquoi c’est mouillé ici? 

C’est la mousse, mon chéri. Fais attention à ne pas glisser.

De la supercherie De la supercherie

Cette réflexion est née d’un constat. La vie ne nous appartient pas. Elle nous a été léguée et nous la rendrons en même temps que notre dernier souffle.

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